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JUMPIN’ GINO WASHINGTON

 


Detroit, Michigan, la Motor City, ville légendaire du MC5, des Stooges, de Mitch Ryder, des Gories et de tant d’autres, était, et est avant tout la ville de l’explosion du meilleur RnB/soul à partir de 1962 (Nathaniel Mayer, Motown...), et c’est là que naquit au milieu des années 40 Gino Washington, George de son vrai nom. Il commença très tôt, dès 13 ans, avec des tremplins, des show télé, écrivant même alors son fameux “Out of this world”. Mais c’est en 62 qu’il enregistre pour le petit label Correc-Tone son premier titre “I’m a coward”, couplé à “Puppet on a string”. “I’m a coward” est une sacrée chanson, presque rock steady ou chacha, avec des superbes choeurs et cuivres. “Puppet on a string”, plus lent, fait irrémédiablement penser à Arthur Alexander ou Smokey Robinson par sa magnifique mélodie et sa retenue pleine de soul.

Grande classe pour un premier jet donc (la suite le prouvera d’ailleurs). Dès la sortie du single, il conquit le public de Detroit, avide de danse et de black music. “Jumpin’ Gino”, un fou de la scène, comparé à James Brown et Wilson Picket pour ses prestations, écume les clubs, comme the Village, et il ne manque pas une occasion de monter sur les planches dès qu’un chanteur manque, ou qu’il a un groupe sous la main, les Rivieras, ou les Royaltones.

Puis, en 63, lors d’un concert à plusieurs groupes, il rencontre The Atlantics, un excellent groupe de teenagers blancs qui jouent du frat rock et des instrus. Il leur propose d’enregistrer un titre avec lui, et 4 titres naitront de cette première session. Bien sûr, rapidement, ils jouent dans toutes les frat parties ou les clubs du coin. Un petit label de Detroit, Amon, s’intéresse à Gino, et sort les 4 titres sous la forme de deux singles: “Out of this world” (repris par les malheureusement défunts Detroit Cobras), couplé à “Come monkey with”; et 2 instrus des Atlantics, “Heartburn” et “Monkey tree” pour le second 7”. (les quatre titres sont réédités sous la forme d’un EP par Norton - EO080). Ce mélange chanteur noir et groupe rock blanc, rare dans les 60’s, est une parfaite combinaison d’énergie rock’n’roll et de R&B plein de soul. Et ce sera un des premiers (et derniers ?) groupes à briser les barrières raciales en jouant tout autant dans le circuit noir que les teen parties blanches. “Out of this world” est un chef d’oeuvre, une tuerie soul avec un sax hurleur, une batterie au charleston dévastateur, et les choeurs divins de The Rochelles (ce groupe vocal féminin était un élément tout autant important que Gino ou que les Atlantics, pour la réussite de leurs disques). “Come monkey with” est un titre de danse imparable. Bref, une bombe que ce single ! ! Et l’effet, cette fois, ne se fait pas attendre puisque “Out of this World” devient rapidement N°1 local, et début 64, Wand rds, label new yorkais, ressort dans la foulée le single pour une distribution et un succès nationaux.

Sonbert (un sous label de Correc-Tone) en profite pour réanimer le tout premier single avec une nouvelle version de “I’m a coward” transformé en “Gino is a coward””, toujours couplé à “Puppet on a string”. La nouvelle version sera plus rapide, moins groove, avec des claps hands tout au long, sur tous les temps. Tout aussi intéressant que différent. Le single monte à la seconde place des charts, juste derrière “Love me do” de qui vous savez. Et de plus en plus accros à la scène, ils arrivent à faire deux à trois concerts par nuit, dans des endroits différents. Et bien sûr, forts de leurs deux hits, ils partent en tournée, écumant le Michigan, l’Ohio, et même le Canada avec les Drifters, Del Shannon et les Temptations. Ils ouvrent aussi pour les Four seasons, les Beach Boys et les Stones. Mais il faudra ensuite de longs mois pour que Wand sorte enfin un troisième single ‘Baby be mine/I’m comin’ home” et ce sera un échec commercial? Mais il n’en est rien d’un point de vue musical. “Baby be mine” est un morceau énergique, Gino y prend une voix incroyable, presque féminine, sur certains passages. Les deux titres mixent comme le précédent 7” la soul et le rock’n’roll, les choeurs des Rochelles sont bien entendu magnifiques. En 64, Gino est appelé pour le service et part au Japon, puis au Vietnam. A son retour, c’est le creux de la vague.

Il reprend enfin du poil de la bête en 67 en enregistrant avec les Tomangoes deux titres pour un single sur son propre label ATAC : “What can a man do” plonge dans la soul pure, mélodie sucrée à la Marvin Gaye (un de ses amis d’alors). En B side, “Doin’ the Popcorn”, jamais entendu par ici. Il fondera par la suite encore 5 autres albels, lui permettant ainsi de sortir des titres inédits de la période avec les Atlantics. Tout d’abord un 7” avec “Romeo/Now you’re lonely” sur Wig, tous deux parfaits pour le dance floor, le premier dans la belle lignée de ce qu’ils avaient sorti auparavant, le second, aussi beau que “Puppet on a string” (si c’est pas Arthur Alexander, c’est Ben E King!). Puis sur ATAC en 68, un nouveau titre “I’ll be around” couplé avec un plus ancien “Like my baby”, pas son meilleur single. Suit un 7” sur Washpan rds avec deux anciens titres, “Do the frog” (avec les Royalties) et “Around the town”, un magnifique balade dont il a le secret. Les autres labels que Gino créera lui permettront de graver à nouveau sur vinyl “I’ll be around” ou “What can a man do”, mais surtout un nouveau morceau très funky "do you have that soul" (sortez pas vos paillettes, c’est du funk à la Rufus Thomas dont il s’agit). En 69, Gino Washington retrouve les Atlantics (il ne reste que le leader guitariste Jeff Williams de la formation originale). Et en 71, il sort son premier LP sr ATAC, “Golden Hits Now”, introuvable bien sûr. La suite reste un mystère pour moi, à part une émission de variété qu’il anime sur une chaîne de detroit dans les 70’s, mais heureusement, sa première période, de 1962 à 1968, est à nouveau à la portée de tous puisque Norton a eu l’heureuse idée de rééditer un album compilant 15 titres, quasiment l’intégrale. Et grâce à Billy et Miriam, Gino Washington va enfin rejoindre le panthéon des géants de la black music des 60’s.

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