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Ca fait déjà quelque temps que ça nous démange d’ouvrir nos pages au ska, au rock steady et au early reggae. Les fabuleuses compilations Soul Jazz (avec les séries Dynamite et Studio One) ont ouvert à nos oreilles avides de soul tout un pan de la musique populaire, celle qui vient de Jamaïque, finalement le seul pays hormis les Usa à avoir réussi l’incroyable pari de créer une musique originale et universelle durant la deuxième moitié du vingtième siècle. Les fondateurs de cette musique ont su insuffler à leurs musiques traditionnelles le véritable esprit de la musique black nord américaine (rhythm’n’blues, doo-wop et soul) et inventer là dessus un rythme unique et tout à fait nouveau : les Maytals, les Skatalites, les Gay Lads, Ken Boothe, Stranger Cole, Jackie Opel, Lee Perry, Jackie Mittoo, autant de noms qui mériteraient chacun un article (c’est pas dit que ça ne se fasse pas). L’Angleterre fut le premier pays d’accueil pour ce rythme et bon nombre de jamaïcains y ont fait carrière. Mieux, les musiciens anglais ont été eux aussi marqués, depuis les mods jusqu’au renouveau ska des eighties. Depuis les fifties jusqu’à aujourd’hui, la musique jamaïcaine a bien sûr évolué jusqu’au dance hall, au ragga, mais les racines restent toujours ancrées chez la plupart des jeunes groupes (je ne parle pas là de la "nouvelle" scène ska punk, pitié...), et c’est sans aucun doute encore en Angleterre qu’on peut trouver ce qui se fait de mieux dans le genre. Intensified, par exemple, un groupe magique sur scène, avec deux vrais grands chanteurs soul ! Et aussi, ce fantastique groupe, Pama International, que je vous propose de découvrir aujourd’hui.

 

 


C’est notre ami Maz, des Muckrackers (et ex perfect cousins et protex blue) qui nous fit découvrir ces anglais il y a un an et demi, avec un single qu’il sortait alors sur son label Bankrobber. Une grosse claque pour moi avec la face B, “Second Chance” (une reprise plus qu’obscure de Lloyd Charmers chantée par Ken Boothe) et en face A un original “Thank you” qui nous montre l’autre facette du groupe, la soul music (façon pop/ blue eyed soul). Ni une ni deux, je commande l’album dont est extrait le single, un album sorti sur leur propre label, Jamdown (label qui sortit un album des Stubborn Allstars sur lequel apparraissent Rancid, Fishbone, Slackers, Bosstones et les Skatalites). Que des originaux (9), hormis “second chance”. Pama International a tout compris du rock steady, du reggae et de la soul music (leurs influences vont des Wailers et Prince Buster, à Marvin Gaye et Otis redding en passant par Lee “Scratch” Perry), et surtout ils savent pondre des mélodies incroyables.

côté musique, c’est l’harmonie parfaite, une rythmique souple et groovy, une trompette inventive et superbe, un orgue hammond majestueux. Sean Flowerdew, l’organiste, compositeur et âme du groupe n’en est pas à son coup d’essai. Il jouait déjà à la fin des eighties dans les Loafers (avec qui il a accompagné Laurel Aitken). Puis il joue dans the Special Beat (avec d’ex Beat et ex Specials, vous vous en doutiez), et enfin Skanga, avant de former enfin en 2001 Pama International. Au chant (et quel chant !), Finny, qui lui aussi fit partie des Loafers et de Special Beat. A la batterie, à la basse et derrière les consoles quand il ne joue pas, un ancien Pop Will Eat Yourself, Fuzz Townshend, et enfin le sobre mais excellent guitariste Dan Foster et le trompettiste magique, Simon Wilcox. En studio, ils ne recherchent pas un son d’époque, mais bel et bien un son moderne, profond, puissant, avec des grosses basses, et même quelques gimmicks modernes, dub samples ou machines... Mais comme dit précédemment, le principal atout des Pama, ce sont les chansons, comme “Truly Madly Deeply”, “Love we give” ou “Evening Time” et la voix superbe de Finny. Le premier album sorti en 2002, sans l’appui de majors, a réussi l’exploit de passer sur les plus grosses radios anglaises, et Pama International a même enregistré live 3 titres pour l’émission de Radio One “Lock stock”, la référence outre Manche.

 


Quelques mails échangés avec l’organiste Sean, et le hasard fit qu’il venait passer quelques heures à Chambery chez un pote à lui en novembre 2003. Rencart fut pris, quelques mousses bues. Une heure cool et passionnante qui suffit pour nous convaincre l’un et l’autre de collaborer à un second 45tours de Pama International sur le territoire français. Ils étaient en train de finir leur second album, “Too many Freaks, not enough stage” toujours uniquement en CD (...) sur Jamdown, et Sean m’envoyait rapidement une démo. Là, malgré le côté pas fini (pas mixé ni masterisé, avec même des instruments pas encore enregistrés), je restais sans voix à l’écoute de ce qui allait se révéler être, après renseignements pris auprès de Sean, une compo, et quelle compo. “All about you” est la plus belle chanson actuelle entendue depuis des lustres, une love song à pleurer, digne du meilleur Ken Boothe, avec ses “I was born to make you happy, to make you smile”. La face A était toute trouvée, le choix pour la seconde face allait se révéler plus dur, vu la classe des autres chansons proposées. Je jetai enfin mon dévolu sur du grand rock steady encore, mêlé à la meilleure pop, avec “Don’t live a lie”, sa voix lumineuse et soul, des chorus de cuivres mélodiques et magnifiques, et une fin technoïde réussie. une face B parfaite pour ce qui allait devenir le premier single reggae sur larsen/ B-Soul.

 


Avril 2004, l’album “Too many Freaks, not enough stage” sortait enfin, 8 titres seulement, mais pas une seconde d’inutile, voir même moyenne. Non, que du terrible, avec, hormis les deux pré-cités, 6 autres perles. Pour démarrer, “Paradise Found”, un morceau atmosphérique, avec batterie rebondissante et free, basse dub, bruitages, pédale wah wah et trompette bouchée : excellent et original. Suit “Time will tell” sur lequel l’orgue hammond et le chant mènent la danse. Plus loin, “The Greatest show on earth”, un plongeon dans les roots (les Maytals) avec un superbe saxo rauque, un titre emprunté à Prince Buster (“Freezing Up Orange Street” avec des paroles de Sean), avec une fin “dub” envoutante. Puis la pure ballade soul, miraculeuse, “Learning to love again” où le groupe (le hammond et les deux voix en tête) flirte avec les plus grands du genre, Marvin Gaye, Sam Cooke... Plus moderne avec “Give of my heart” et son rythme entêtant, avec toujours ce talent mélodique. Et pour finir du ska roots (Jim Murple devrait adorer) avec une adaptation “Ska Jam” de Tommy McCook & The Supersonic (aussi leader et sax ténor des Skatalites), rebaptisé “Sunday Social”. Pama International a frappé un grand coup, capable d’intégrer le meilleur des sons modernes, des vibrations roots authentiques et des chansons hors pair.


Le futur de Pama International, c’est sans aucun doute le continent puisqu’ils sont de plus en plus demandés dans les festivals, et que deux labels allemands et italiens doivent rééditer ce deuxième album, sans doute augmenté des 3 titres live à la BBC. Pour la France, nous aurons la chance de sortir ce même album en vinyl, et ce d’ici la fin de l’année. Lui aussi sera complété de quelques titres pas encore choisis à cette heure. En attendant, Jamdown doit sortir un tribute au Clash, “Clash Version Rockers”, avec des groupes australiens, américains, anglais, français. Déjà programmés, King Django, The Riffs, Skinnerbox, Stubborn Allstars, Pama International, Dr Octopus, et le Teen’Axel Soul Arkestra.


benny gordini juin 2004